Le Prurit anal est l’ensemble des sensations cutanées péri-anales qui déclenchent le besoin de grattage.

Le prurit anal est fréquent car l’anus est une région propice au prurit. L’innervation est importante et donc l’irritation rapide ; de nombreuses causes sont réunies : physionomie de la région avec un pli qui facilite la macération d’autant qu’il peut exister de nombreuses causes de souillure d’origine anale, urologique ou gynécologique. De la même façon, trop d’hygiène est aussi néfaste qu’une insuffisance de nettoyage.

Le prurit est quatre fois plus fréquent chez l’homme que chez la femme, la cause en est inconnue une fois sur deux. On retient deux grands groupes de pathologie à l’origine du prurit anal : des causes proctologiques en rapport avec une maladie de l’anus et des causes dermatologiques en rapport avec des maladies de la peau de la région péri-anale.

Toute pathologie qui crée une irritation cutanée, soit par atteinte de la peau elle-même, soit indirectement en provoquant des suintements et des écoulements conduit à l’apparition du prurit. Les suintements peuvent être constitués de pus, de fuites de matières fécales dans le cadre d’une incontinence anale mais aussi de simples sécrétions digestives ou gynécologiques.

Le mécanisme d’apparition du prurit est une sensation d’irritation, de brûlures et de démangeaisons qui va entraîner le grattage. Le grattage est à l’origine de lésions cutanées qui facilitent la surinfection locale, l’hyper-sensibilisation de la peau qui devient encore plus irritée et génère une sensation de démangeaison qui s’auto-entretient. Une fois le cercle vicieux enclenché les démangeaisons peuvent évoluer pour leur propre compte alors même que la cause aura disparue. Ceci explique que l’examen clinique ne retrouve de cause qu’une fois sur deux.

Devant cette affection fréquente, que faire en cas de démangeaisons ? Il faut consulter pour essayer de trouver la cause déclenchante dont le traitement permettra de supprimer l’irritation et les démangeaisons. Souvent cette consultation est tardive par rapport à la cause initiale ce qui rendra la recherche plus difficile.

Le diagnostic est le plus souvent clinique. L’interrogatoire permettra de caractériser le prurit : topographie (marge anale et/ou canal anal), la date de début, horaires (vespérale, nocturne…), les circonstances d’apparition par rapport à la défécation ou par rapport à la toilette. Il faut également noter les prises médicamenteuses car certaines peuvent être à l’origine de démangeaisons (certains anti- hypertenseurs), et les antécédents médicaux (diabète, obésité, troubles de la continence).

Puis le médecin réalisera un examen clinique complet de tout le corps à la recherche d’arguments pour une cause dermatologique (eczéma, psoriasis, lichen plan), mais également un examen spécifique de la région anale et du canal anal avec la réalisation d’une anuscopie voire si nécessaire d’une rectoscopie.

Parfois, des examens complémentaires pourront être demandés (bilan biologique pour rechercher une cause générale comme le diabète, un mauvais fonctionnement de la thyroïde ou du rein, une maladie du sang ou une anomalie du métabolisme de l’acide urique dans le cadre de la goutte ; biopsie cutanée, bilan endoscopique…).

A l’issue de la consultation, deux cas de figure sont possibles :

  • La cause du prurit est suspectée voire affirmée : le traitement de la cause va entraîner la disparition du prurit :
    • Pathologie digestive ou proctologique : condylomes, fissure anale, fistule anale, marisque, parasitose (oxyurose), dermite érosive sur suintement
    • Dermatose : eczéma, psoriasis, lichen plan, maladie de Paget, maladie de Bowen
    • Toilette intime excessive
  • Il n’y a pas de cause évidente ou la cause a disparu et en l’absence de pathologie cutanée ou anale, il sera décidé de donner un traitement symptomatique.

Le traitement

Il faut tout d’abord insister sur des règles hygiéno-diététiques strictes : il faut maintenir une région péri-anale propre et sèche pour éviter le grattage.

Il sera conseillé un lavage une fois par jour avec un savon doux ou un savon surgras ou un pain sans savon. Il faut sécher minutieusement sans frotter pour éviter les démangeaisons. Cette toilette devra également être faite après chaque selle lorsque cela est possible.

De même, il faudra éviter tout contact avec des matières synthétiques en faisant particulièrement attention à la qualité de tout ce qui entre en contact avec cette région : protections périodiques ou protèges slips, papier toilette dont l’efficacité pour le nettoyage n’est pas évidente, souvent abrasif et porteurs de produits chimiques comme les agents masquant les encres dans les papiers recyclés..

En cas de lésions aiguës, on utilisera volontiers des pates à l’eau, pommades sans substance active ou contenant simplement de l’oxyde de zinc pour protéger la peau en particulier s’il existe un facteur de suintement associé non traité, incontinence fécale par exemple.

Le traitement de la cause sera entrepris si celle-ci est retrouvée (dermocorticoïde avec décroissance progressive en cas de dermatose type eczéma ou psoriasis, anti-mycotique, anti-parasitaire, traitement proctologique…)

En l’absence de cause, ou si la cause a disparu, on fera souvent appel mais uniquement sur indication médicale à des traitements par dermo-corticoïdes qui permettent de redonner à le peau une structure normale évitant la récidive des démangeaisons et supprimant les effets de celle-ci lorsqu’elle a entraîné un épaississement excessif et des anomalies du revêtement cutané.

Enfin, lorsque le prurit est très ancien, irréductible, certains nouveaux traitements sont parfois efficaces, mais là encore doivent être prescrits par des médecins entraînés à cette pathologie péri-anale, on utilise en particulier volontiers des préparations magistrales à base de capsaïcine sous forme de teinture de capsicum associé à de l’anovaseline en application locale une fois par jour.

Quoi qu’il en soit, l’existence d’un prurit anal nécessite une consultation auprès d’un médecin spécialiste, un diagnostic précis d’une éventuelle cause dermatologique ou proctologique, l’établissement de la relation de causalité de cette étiologie et la mise en route de son traitement. Les règles hygiéno-diététiques sont la base de ce traitement. Il faut aussi savoir proposer un moindre doute, et notamment en cas de saignement une coloscopie pour éliminer une lésion digestive associée.

Dr. Philippe GUYOT, Dr. Anne Laure TARRERIAS
Mise à jour en janvier 2019, Dr Alix PORTAL (Paris)