TECHNIQUES CHIRURGICALES PROCTOLOGIQUES

ANOPLASTIE MUQUEUSE

J. DENIS – T. du PUY-MONTBRUN – R. GANANSIA

Service de Colo-proctologie
Hôpital Léopold BELLAN, 19 – 21, rue Vercingétorix, 75014 PARIS – FRANCE

Avec la collaboration de N. DUBOIS, N. LEMARCHAND, P. BENFREDJ et D. SOUDAN


L’anoplastie muqueuse postérieure est une technique permettant le traitement des fissures anales, des sténoses anales congénitales ou acquises non cancéreuses. Elle permet l’exérèse de la fissure et de ses annexes et son examen anatomopathologique ainsi qu’une eventuelle sphinctérotomie interne. Elle peut aussi être associée à une hemorroïdectomie type Milligan-Morgan. Après dissection de la fissure ou de la zone cicatricielle, la muqueuse rectale est abaissée en rideau et suturée au sphincter interne au niveau de la ligne pectinée. Le malade est en position de la taille sous anesthésie générale, loco-régionale ou locale. On prend pour type de description une fissure anale postérieure non infectée. Nous distinguons trois temps principaux : dissection-abaissement ; excision ; suture.

1 DISSECTION – ABAISSEMENT

Une pince de Chaput est placée à la base de la fissure . Une solution adrénalinée est injectée sous la peau et sous le plancher de la fissure pour faciliter la dissection et limiter le saignement. On sectionne la peau (au bistouri, aux ciseaux, ou au laser ) de chaque côté de la pince ; deux incisions verticales cutanées prolongent ensuite les incisions faites de part et d’autre de la base de la fissure et une incision horizontale permet de tracer le lambeau cutané. Une pince d’Ombredane est placée au bord inférieur de ce lambeau qui est disséqué d’arrière en avant. Des écarteurs moulés d’Arnous sont introduits dans le canal anal. Il faut maintenant remonter jusqu’à la muqueuse rectale en libérant le sphincter interne : la dissection est donc poursuivie en arrière par la section des fibres du ligament de Parks en même temps que sont prolongées les incisions latérales de chaque côté jusqu’à la muqueuse rectale en convergeant vers la ligne médiane. Le sphincter interne apparaît nettement avec ses fibres blanches transversales ( barre de Blaisdell ) ; la muqueuse rectale ainsi décollée est saisie par deux pinces de Chaput- Mayo et s’abaisse facilement.

2 EXCISION

On sectionne le lambeau ( avec la fissure et ses annexes ). Une sphinctérotomie peut être éventuellement pratiquée : elle intéresse les fibres les plus internes et les plus basses du sphincter interne.

3 SUTURE

La muqueuse rectale abaissée est alors fixée au sphincter interne par trois points de fil résorbable fin. La largeur totale de la suture ne doit pas excéder 15 mm.


L’intervention peut être éventuellement complétée par une dissection sous-cutanéo-muqueuse des hémorroïdes adjacentes qui pourraient venir faire clapet sur la plaie.


Réf.:

  • PARNAUD E, ARNOUS J, DENIS J : la leiomyotomie avec anoplastie dans le traitement des fissures anales.
  • Presse Med. (1968) 76 1661-3
  • BUIE L.A. : Practical Proctology – 2nd Ed. Springfield Charles Thomas – 1960. 176-8


1 vue initiale de la fissure du pôle postérieur.


2 coupe frontale de la fissure laissant voir les fibres du sphincter interne.


3 une pince de Chaput est placée à la base de la fissure.


4 injection de solution adrénalinée :
a) sous la peau
b) sous le plancher de la fissure

5 incision cutanée aux ciseaux à droite de la fissure.


6 incision cutanée aux ciseaux à gauche de la fissure.


7 schéma des incisions : lambeau à base
cutanée et à sommet sus-pectineal.


8 le lambeau cutané est incisé.


9 dissection du lambeau cutané.


10 poursuite de la dissection jusqu’à la zone rectale.


11 même dissection à gauche : les ciseaux sont dirigés vers la ligne médiane pour éviter un lambeau muqueux trop large.


12 la muqueuse est détachée du sphincter interne par section du ligament de Parks.


13 deux pinces de Chaput Mayo sont placées sur
la muqueuse rectale solide.


14 section du lambeau en muqueuse rectale.


15 visualisation du sphincter interne en réclinant
le lambeau muqueux.


16 sphinctérotomie interne (éventuelle) prudente, au bistouri, fibre par fibre.


17 la muqueuse s’abaisse facilement en rideau
pour venir se placer sur le sphincter interne.


18 1er point de suture médian : l’aiguille charge la muqueuse rectale et le sphincter interne.


19 3ème point de suture.


20 la suture est terminée : sa largeur ne doit pas dépasser 15 mm.


21 vue finale.


GESTES A NE PAS FAIRE

  1. Un lambeau cutanéo-muqueux trop large qui risque d’entraîner une exérèse muqueuse trop importante.
  2. Sectionner le sphincter interne en incisant la peau.
  3. Pratiquer une sphinctérotomie interne inutile ou trop poussée peut conduire à un risque d’incontinence.
  4. Une suture muqueuse trop large qui risque de créer une barre scléreuse postérieure.
  5. L’abaissement excessif de la muqueuse rectale qui crée un ectropion.

1 Généraux :

  • Antibioprophylaxie des infections à germes aéro et anaérobies.
  • Prévention de la constipation par l’administration de laxatifs (lubrifiants, mucilagineux ou osmotiques).
  • Antalgiques.

2 Locaux :

  • Nettoyage de la plaie par une solution antiseptique
  • Recouvrir la plaie avec un colorant en solution aqueuse.
  • Application d’une pommade couvrante.
  • Mise en place quotidienne d’un suppositoire lubrifiant et couvrant (Titanoréïne).

COMPLICATIONS POST-OPERATOIRES

Elles sont rares

1 Précoces:

  • dysurie et rétention urinaire
  • hémorragie de plaie.

2 Retardées:

  • infection sous l’anoplastie donnant un abcès sous-muqueux ou intersphinctérien.

3 Tardives:

  • récidive de la fissure (0,05 %) ou de la sténose;
  • hypocontinence aux gaz;
  • suintements.

 

Département Proctologie