Qu’est ce qu’un prolapsus rectal ?

On définit par prolapsus une chute ou une issue anormale d’un organe ou d’une partie d’un organe. C’est un terme général qui concerne de nombreux champs (vessie, utérus, valve cardiaque…). Dans le cas qui nous concerne, il s’agit d’une extériorisation par l’anus de toute ou partie de la paroi intestinale. Un prolapsus rectal concerne la paroi du rectum c’est-à-dire la portion toute terminale du gros intestin (qui est un organe creux). Cette extériorisation survient le plus souvent lors de la défécation, lors de poussées abdominales ou plus rarement lors d’efforts physiques. En pratique, la paroi du rectum se “retourne” un peu à la façon d’une manche de vêtement que l’on enlève rapidement : on parle parfois d’invagination de la paroi rectale dans la canal anal. On réserve habituellement le terme de prolapsus aux formes les plus importantes que l’on peut observer à l’œil nu. Le terme de procidence interne est par contre plus souvent utilisé pour décrire les invaginations de la paroi qui ne sortent pas à l’extérieur de l’anus. Cette dernière anomalie est une entité à part qui ne sera pas traitée dans la fiche.

Figure : Prolapsus extériorisé par l’anus de la paroi rectale.

Quels signes sont associés à un prolapsus ?

Le principal signe est la constatation d’une formation molle de “chair” qui occupe la région anale lors de la défécation et qui rentre secondairement dans l’anus. Sa taille est variable et il est souvent mesuré en centimètres pour quantifier son importance. D’autres signes importants sont des douleurs du bas ventre, de la partie interne du bassin ou des cuisses qui sont souvent accentuées lors de la défécation. Ces douleurs peuvent également se traduire par une sensation de poids ou d’inconfort dans la partie profonde de l’anus notamment en fin de journée. Cette gêne disparaît souvent en position couchée. Des fausses envies d’aller à la selle sont également fréquentes et parfois très invalidantes. Il existe enfin des faux besoins c’est-à-dire des émissions de mucus, de glaires (comme des crachats) ou de sang à la place de la selle lors de la défécation. Ce processus peut se répéter de façon fréquente dans la journée.

Quelles sont les personnes qui s’en plaignent et pourquoi ?

Le prolapsus est le plus souvent observé chez les femmes après la ménopause. Cette anomalie est alors associée à des troubles plus diffus du périnée et des autres organes du petit bassin : prolapsus de la vessie ou de l’utérus. On considère alors que le prolapsus témoigne d’une fragilisation un peu générale des tissus et des moyens de soutien des organes du petit bassin. Ce processus de fragilisation peut être la conséquence de la privation hormonale liée à la ménopause, d’un long passé de constipation avec efforts importants de poussée, d’accouchements difficiles, d’un ou plusieurs gestes chirurgicaux (ablation de l’utérus). A l’inverse, le prolapsus rectal peut être observé chez des personnes jeunes ou des enfants. Un prolapsus de grande taille peut ainsi être noté chez un adolescent sans qu’aucun facteur “traumatique” ou de fragilisation n’ait été observé.

Quelles complications du prolapsus peuvent être observées ?

La paroi du rectum peut être endommagée par sa mobilité anormale, son passage dans le défilé étroit de l’anus ou lorsqu’il ressort. Il n’est donc pas rare qu’il puisse se former des plaies ou ulcères, une inflammation ou un œdème. Dans de très rares situations, il peut être enserré par l’anneau des sphincters qui ferment l’anus et ne plus pouvoir réintégrer l’intestin : on parle alors d’étranglement. Il est observé dans près de la moitié des cas un relâchement des muscles de l’anus pour une raison qui n’est pas totalement éclaircie (dilatation anale répétée) : des difficultés à retenir les gaz, les glaires et les selles en sont les signes les plus fréquents.

Quels sont les principes du traitement ?

Dans un concept purement mécanique de la guérison, on conçoit qu’il faille entraver cette sortie anormale de paroi rectale. Une approche simple consiste à corriger la constipation et à limiter les efforts de poussée. Cette stratégie est privilégiée lorsqu’il s’agit d’un prolapsus de l’enfant ou lorsque la situation a été observée de façon exceptionnelle dans un contexte tout aussi exceptionnel (épisode de constipation sévère et isolé ayant induit des efforts de poussée exagérés).
Dans les autres situations, cette approche ne suffit pas et il faut recourir à une chirurgie de fixation de la paroi rectale. Un premier concept est de réaliser un plissement suffisamment épais de la paroi rectale ou encore de la fixer par une prothèse souple afin qu’elle ne ressorte plus. Ces stratégies peuvent modifier les conditions de défécation et induire ou aggraver la constipation.
Une troisième option peut être d’enlever toute ou partie de la paroi du rectum : ces techniques réduisent néanmoins les capacités du réservoir rectal avec les conséquences qu’on peut comprendre (selles plus fréquentes et impérieuses, incontinence majorée).
Le choix du type de traitement chirurgical dépend de nombreux paramètres que sont l’âge, l’importance du prolapsus, la sévérité des signes associés au prolapsus (constipation incontinence) avant le traitement, la présence d’autres prolapsus associés qu’il faudra traiter dans le même temps.

Aucune stratégie chirurgicale n’est actuellement vraiment supérieure aux autres : elles ont dans certaines situations plus ou moins d’avantages que vous devez évoquer avec votre médecin.

Pr Laurent Siproudhis

Mise à jour : décembre 2008