PRINCIPE

  • Obturer le trajet d’une fistule anale en y injectant une colle biologique
  • Cette colle est constituée de l’assemblage extemporané de facteurs de la coagulation dérivés du sang humain (notamment, thrombine et fibrinogène) et d’un inhibiteur de la fibrinolyse d’origine bovine (aprotinine). Les deux composants reconstitués séparément sous forme liquide coagulent quasi instantanément lorsqu’ils sont mis en contact. Ce coagulum va obturer le trajet fistuleux et servir de support à la cicatrisation notamment lors de sa colonisation par les fibroblastes.

INDICATION

  • Deuxième temps de traitement d’une fistule anale complexe asséchée (non productive), dans un souci d’épargne sphinctérienne

CONTRE-INDICATIONS

  • Grossesse et allaitement (en raison de l’absence d’étude spécifique)
  • Allergie à l’un des composants de la colle, en particulier hypersensibilité exceptionnelle à l’aprotinine bovine.
  • Ce produit ne doit pas être injecté en intraveineux, dans le cas présent peu probable vu le mode d’application.

FACTEURS DE RISQUES D’ECHEC DE L’ENCOLLAGE

  • Anatomiques :

Existence d’un diverticule.

Trajet fistuleux court (longueur inférieure à 30 mm) et large (diamètre supérieur à 5 mm).

Fistule s’ouvrant dans le vagin (ano ou recto-vaginale).

  • Etiologiques :

Maladie de Crohn.

  • Inflammatoires locaux :

Fistule non asséchée : écoulements importants par l’orifice fistuleux, épisodes douloureux.

En cas d’association à une maladie de Crohn : absence de rémission luminale, persistance d’une rectite, persistance de signaux inflammatoires (hyper-signal T2 en IRM) sur le trajet fistuleux et au niveau de la paroi rectale.

  • Si la fistule est spontanément non inflammatoire, il n’est pas démontré qu’un drainage préalable par une anse élastique augment le taux de réussite.

Au vu de ces critères on comprend le possible facteur pronostique de l’IRM préopératoire (encore non démontré).

PREPARATION

  • Micro-lavement ou suppositoire évacuateur si le patient n’a pas eu de selle le matin de l’intervention.
  • En raison du risque de dénaturation des principes actifs de la colle, ne pas appliquer sur le champ opératoire de solution alcoolisée, iodée ou à base de métaux lourds, autant lors de la douche pré-opératoire que lors de la réalisation du champ opératoire (utilisation possible du Dakin®).
  •  

ANESTHESIE

  • Générale, rachi-anesthésie, loco-régionale (sous sédation).
  • Certaines équipes font cette intervention en ambulatoire, pour d‘autres il faut respecter un repos au lit de 8 à 12 heures.
 

POSITION DU MALADE

Décubitus dorsal, cuisses fléchies sur le bassin.
 

MATERIEL SPECIFIQUE

  • Colle biologique type Tissucol* ou Bériplast*. Les kits de colle biologique doivent être conservés entre 2 à 8°C et à l’abri de la lumière.
  • Curette ou brossette (type brossette pour nettoyer les canaux des endoscopes) pour aviver le trajet fistuleux.
  • Un cathéter gris ou orange pour injecter la colle sur toute la longueur du trajet fistuleux.
 

PRINCIPALES ETAPES

  • Pas d’anesthésie périnéale.
  • Pose d’une sonde urinaire en cas de fistule ano ou recto-vaginale proposée par certaines équipes.
  • Examen de l’anus et du canal anal pour valider l’indication et éliminer une contre-indication ou un facteur d’échec à l’injection de la colle (cf supra).

Figure 1  : examen d’une fistule ici sur maladie de Crohn.

  • Ablation de l’anse élastique de drainage.
  • Curetage ou brossage du trajet pour nettoyer le trajet.

Figure 2  : curetage du trajet.

  • Irrigation au sérum physiologique par instillation au niveau de l’orifice externe jusqu’à tarissement du saignement.
  • Reconstitution de la colle. Chacun des deux flacons doit être prélevé avec deux aiguilles différentes afin d’éviter une polymérisation prématurée. Chaque solution doit être chauffée à 37°C (utilisation possible d’un appareil permettant de chauffer et agiter les deux flacons).
  • Remplissage et assemblage des deux seringues connectées à un raccord et un cathlon. Une fois reconstituée, la colle doit être injectée immédiatement, même si la stabilité du produit dure jusqu’à 4 heures.

Figure 3 : les deux composants de la colle (Tissucol®) dans chacune des deux seringues connectées à un raccord et un cathlon gris.

  • Introduction dans le trajet fistuleux à partir de l’orifice externe du cathéter. Idéalement le cathéter doit atteindre l’orifice interne. On peut aider son introduction par passage préalable d’un fil dans le trajet, ce fil étant ensuuite noué autour de l’extrémité du cathéter.

Figure 4 : cathéter un place, début de l’injection avec retrait progressif en suivant le remplissage du trajet.

  • Injection de la colle jusqu’à l’apparition d’un « clou » de colle au niveau de l’orifice interne, ensuite retirer progressivement le cathéter en continuant d’injecter doucement et sans faire de pause. Ceci pour remplir en une fois le trajet fistuleux sur toute sa longueur.

Figure 5 : trajet rempli avec apparition d’un clou à l’orifice interne.

Figure 6 : retrait du cathter tout en remplissant le trajet.

  • Après application, couper les exhubérances de colle au niveau des deux orifices fistuleux afin d’éviter un « arrachement » de tout le bouchon de colle.

Figure 7 : ablation du surplus de colle au niveau de l’orifice externe.

  • Il n’est pas démontré qu’obturer l’orifice interne par un point augmente le taux de réussite.
  • En fin d’intervention, pansement sec en évitant de l’appliquer sur l’orifice cutané (afin d’éviter d’arracher la colle au retrait du pansement). Ne pas mettre de crème, ni de tulle gras pour ne pas dégrader la colle
  • Pendant un semaine, toilette à l’eau sans pression. Pas de désinfectant. Pas de crème. Protection douce.
  • Certaines équipes font cette intervention en ambulatoire, d’autres conseillent un repos au lit 8 à 12 heures. Recommander au patient de ne pas faire d’effort physique pendant 7 à 10 jours, éventuel arrêt de travail en conséquence
 

GESTES ASSOCIES

  • L’association de la colle biologique à l’obturation par un lambeau muqueux rectal n’améliore pas les résultats.
  • Il n’est pas prouvé qu’une antibiothérapie poursuivie pendant plusieurs jours améliore les résultats. L’antibioprophylaxie per-opératoire avec 1 g de métronidazole reste par contre recommandée.
 

LES POINTS IMPORTANTS :

Respecter les contre-indications et tenir compte des facteurs de mauvais pronostic dans le choix de la technique.

Respecter les précautions de reconstitution et d’injection de la colle.

Respecter les consignes de soins post-opératoires.

Crédit photos : Dominique Bouchard.
SNFCP, fiche médecins, technique chirurgicale, colle biologique. Dr Dominique Bouchard (Talence). Juin 2013.
Relecture : Dr François Pigot (Talence).
Mise à jour : août 2019